Epilepsie : « Il faut éviter que le patient ne se blesse en cas de crise » (Pr Napon)

Maladie neurologique caractérisée par une excitation anormalement élevée des cellules du cerveau, l’épilepsie est un phénomène très violent qui mobilise tous les muscles du patient qui se retrouve physiquement fatigué. Fréquente dans nos contrées, au moins 10 burkinabè sur 1000 en souffrent. Tout savoir sur cette maladie avec le Chef de service de neurologie du CHU de Bogodogo, le professeur Christian Napon. Spécialiste en neurologie, Pr Napon enseigne à l’UFR Sciences de la santé à l’université Joseph Ki Zerbo.

Pr Napon

Comment se manifeste l’épilepsie ?

Les crises épileptiques sont des manifestations qui viennent d’emblée.
Elles peuvent se manifester sous forme :

–  Motrice, c’est-à-dire par des convulsions,
–  Sensitives,
–  Sensorielle : la personne a une vision ou entend des voix ou a un goût particulier sur la bouche,
–  Végétative : la personne se met à transpirer sans qu’on ne comprenne pourquoi ou voit sa tension chuter ou s’élever etc…
– Psychique : le patient a un comportement brutal qui s’apparente à de la folie.

Chaque fois que la personne est en crise, tout son cerveau se met en branle et après la période de la crise, le patient peut en être complètement confu. Au moment de la crise on a une phase où les bronches vont secréter. Le patient respire avec beaucoup de ronflement et si ces crises se répètent sans retour à l’état de conscience, ça peut engager son pronostic vital.

Causes de l’épilepsie

– Causes génétiques : beaucoup de formes sont héréditaires mais il ne s’agit pas forcément d’une hérédité directe. Elle peut venir d’un grand-père, d’un arrière-grand-père…

– Causes structurales liées à une lésion du cerveau : si vous êtes né avec une malformation au niveau du cerveau, ça peut se manifester sous forme de crise. Ou bien à l’occasion d’un traumatisme avec les accidents sur la voie publique, si votre tête a touché le sol et qu’il y a eu un retentissement au niveau du cerveau avec une lésion, par la suite, vous pouvez avoir des crises d’épilepsie.

– Causes infectieuses : quelqu’un qui fait une encéphalite dans le contexte du VIH ou de la Covid, peut avoir des crises d’épilepsie.

Causes métaboliques : quand il y a une baisse ou une augmentation de la glycémie,
Comment se fait le diagnostic ?

Si vous avez assisté à la crise, vous pouvez faire le diagnostic parce que c’est assez parlant. Mais très souvent le malade vient nous voir parce qu’il a eu une crise à la maison et ceux qui ont assisté à la crise racontent. Il s’agit de quelque chose qui survient de façon répétée accompagnée parfois d’une perte de connaissance avec des secousses musculaires qui peuvent intéresser tout le corps ou une partie du corps.

– Le patient peut se blesser. On vérifie qu’il n’y a pas de traces de blessures parce qu’en général le patient n’arrive plus à se contrôler et on lui demande s’il se souvient de ce qui s’est passé,

– Quand c’est une épilepsie généralisée, le patient n’a aucun souvenir et c’est ça qui fait la dangerosité imaginez un patient qui pique sa crise étant en circulation,

– Souvent on peut retrouver une morsure de langue,

– Il y a un examen appelé électroencéphalogramme qu’on fait dans les services de neurologie qui en disposent pour confirmer le diagnostic. On pose un casque avec des électrodes sur la tête du patient et pendant 20 mn on enregistre l’activité du cerveau. Si c’est un cas d’épilepsie, il y a des signes qui vont apparaître et qui vont orienter le médecin. On peut compléter l’examen par un scanner pour savoir si l’origine est non génétique puisque quand ce n’est pas génétique on peut ne pas trouver d’anomalie au scanner,

– Mais quand c’est lié à des lésions ou des malformations du cerveau, le scanner ou l’IRM va permettre de faire le diagnostic de la cause.

Que faut-il faire ou pas pendant la crise ?

On ne peut pas arrêter une crise qui est déclenchée. Ce qu’on peut faire, c’est d’éviter que le patient ne se blesse en le protégeant contre ce qui peut le blesser. Quand il aura fini sa crise on peut le mettre sur le côté.

Avant il arrivait qu’on pose une canule dans la bouche pour éviter que le patient se morde la langue. Mais il y a eu des incidents avec ça, des gens qui ont été étouffés car ces canules obstruaient les voies respiratoires. Donc c’est déconseillé.

Quels sont les effets de la crise sur le cerveau?

Quand les crises se répètent, le cerveau en souffre. Après une première crise, le patient est confu parce qu’il y a eu souffrance du cerveau.
Les retentissements sur le plan psyco-social
La stigmatisation, la marginalisation, le rejet.

 Quels sont les traitements proposés ?

Il y a deux types de traitement. Le traitement de la crise et le traitement de fond pour éviter que le patient ne refasse une crise. Quand le patient est en train de faire sa crise on peut lui mettre un traitement à base de benzodiazépine. Souvent on le met par voie injectable ou intra rectale pour essayer d’arrêter la crise. Si c’est quelqu’un qui a fait au moins deux crises ou susceptibles d’en refaire une, il faut initier un traitement de fond par les antiépileptiques. Si ce traitement marche bien, ça prévient la survenue d’une crise.

Il y a des patients, quand ils prennent bien leur traitement ils ne feront plus de crise. Il y’en a d’autres qui peuvent guérir au bout de 2 à 3 ans et on peut même arrêter le traitement. Mais certains vont quand même faire des crises malgré le traitement et en ce moment on est obligé de faire des combinaisons, d’ajouter un deuxième ou même un troisième. 70% des patients en général qui suivent bien le traitement ne feront plus de crises.

Madina Belemviré 

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